La recherche de l’épanouissement au travail est en constante progression. Pour y répondre, les entreprises cherchent à répondre aux aspirations de leurs collaborateurs. Elles ont aussi besoin de challenger leur fonctionnement pour utiliser et libérer toutes les énergies. Un collaborateur va pleinement s’épanouir et s’engager s’il se sent reconnu dans sa singularité.
Il n’y a jamais eu autant d’articles, de prises de parole, de formations et même de lois et dispositifs liés à la qualité de vie au travail, parfois même au bonheur au travail. Or dans le même temps, tout ce qui est lié aux risques psychosociaux – stress, dépression, Burn Out – explose. Comme si les deux courbes étaient parallèles sans qu’on sache au juste laquelle des deux guide l’autre : parle-t-on de QVT pour pallier aux RPS, ou est-ce possible que l’injonction au bonheur engendre plus de stress qu’elle n’en retire, notamment quand cette injonction est perçue comme paradoxale par rapport à la pression mise par ailleurs par l’entreprise ? CQFD
En tous cas, cela pose la question de l’épanouissement au travail.
Lors d’une récente mission, je faisais travailler les participants d’un séminaire managérial sur un modèle comportemental pour mieux se connaître et mieux gérer la relation avec ses collaborateurs. Au moment de remplir le questionnaire d’auto-évaluation, un manager me posa une question déjà entendue à de nombreuses reprises : “je le remplis en pensant au cadre professionnel ou au cadre privé ?” Cette question fort pertinente mais aussi d’une certaine façon surprenante montre bien que beaucoup de personnes ne se comportent pas de la même façon au travail et dans leur vie privée.
Le travail est en effet un lieu de codes, où il est demandé à chacun de rentrer dans un moule.
Tout ne peut pas s’y dire, tout ne peut pas s’y faire. D’abord pour des raisons légales, qui sont d’ailleurs aussi valables hors de l’entreprise. Pour respecter l’image de l’entreprise à laquelle on se doit contractuellement d’être loyal.
Mais aussi parce que les rapports n’y sont pas aussi authentiques qu’ils le sont généralement par ailleurs. C’est avant tout une question de rapport à l’autorité, qui singulièrement dans les cultures latines et en tout cas en France est très hiérarchisé. Ce qui amène certains managers à adopter une posture « supérieure » ; dans laquelle des salariés peuvent ne pas se sentir libre de dire ou faire ce qu’ils voudraient.
En complément, un manager n’est pas une figure totalement neutre pour un collaborateur ; c’est lui qui évalue et influence la progression et la rémunération. Le collaborateur peut donc avoir tendance à ne pas se sentir complétement libre dans ses comportements et ses avis. Il va s’autocensurer.
Ce qui n’est pas la meilleure façon de se sentir pleinement épanoui et engagé.
C’est la responsabilité de l’entreprise et du management de contrecarrer cette tendance par une culture et des pratiques managériales qui promeuvent la confrontation d’idées et la prise d’initiatives.
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La seconde raison qui peut avoir un impact sur l’épanouissement concerne le rapport que chacun a avec sa vie professionnelle : quelle image ai-je de l’entreprise ? Qu’est-ce que j’attends du travail en général et de mon emploi en particulier ?
Le rapport au travail et l’aspiration que chacun y met va bien évidemment avoir un rapport direct avec sa capacité à s’épanouir dans sa mission.
Sur ce sujet, les études récentes montrent une évolution importante. Le travail était vu historiquement avant tout comme un lieu de devoir – je travaille pour nourrir ma famille – Je ne suis donc pas d’abord là pour m’épanouir. De plus en plus, le travail est aujourd’hui considéré comme un lieu d’épanouissement, et notamment pour tous ceux de plus en plus nombreux qui font des études (d’après une enquête de 2012 commandée par Radio France, 75% des parents souhaitent pour leur enfant un travail épanouissant ; ce % est en constante hausse).
Et la pénurie des talents accélère le phénomène ; s’il a le choix, le candidat va choisir l’activité professionnelle la plus intéressante, mais aussi l’environnement qui lui convient le mieux.
Les entreprises l’ont bien compris avec la promotion de tout ce qui se rapporte au bien-être au quotidien.
Ainsi qu’avec la mise en place de politiques RH et de formation qui permettent d’offrir des plans de carrière qui correspondent aux aspirations des collaborateurs, et qui sont susceptibles de les épanouir.
Le nécessaire besoin des entreprises de maitriser ce qui se passe par des process et des reportings a très souvent laissé la place à une culture dominante du contrôle ; c’est souvent d’autant plus le cas que l’entreprise a une taille importante ; cette culture du contrôle générée par une focalisation sur le résultat peut dans sa mise en œuvre être génératrice d’incompréhension voire de stress.
En effet, la perception qui en découle pour beaucoup de salariés, c’est de ne pas se sentir libres de prendre les initiatives qui leur semblent adaptées pour bien faire leur travail. La façon de manager le process peut être infantilisant et abêtir un collaborateur ; cela va être par exemple le cas quand suivre le process n’est pas négociable alors qu’en pratique en réalité, cette tâche n’est pas la bonne façon de procéder en termes d’efficacité ou de satisfaction du client.
La conséquence va alors être une perception négative et soit un sur engagement excessif qui peut aller jusqu’au Burn Out, soit un désengagement plus ou moins fort du collaborateur.Le process était mis en place pour être efficace ; il entraîne, du fait d’un mauvais pilotage, une perte d’efficacité par la perte de motivation des équipes.
Pour compléter le tableau, on peut ajouter que dans un environnement incertain qui induit une attente de réactivité et de prise d’initiatives des collaborateurs pour répondre aux demandes des clients, les entreprises ont plus que jamais besoin de toutes les énergies.
C’est fort de tout ces constats (incompréhension, stress, sur engagement ou désengagement, besoin de toutes les énergies) que se développent de plus en plus des modèles d’organisation et de fonctionnement dits « libérés » et qui consistent à challenger de façon plus ou moins forte les manières de travailler pour faire la part belle aux initiatives et aux idées de tous.
Ces organisations s’appuient sur la confiance dans la qualité individuelle et collective de ses collaborateurs ; tous les exemples montrent qu’elles génèrent en retour de la confiance de la part des équipes et sont bien entendu de ce fait sources d’épanouissement et d’engagement.
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Pour finir, on ne peut pas parler d’épanouissement si on occulte la dimension individuelle du sujet.
Une organisation réinventée va favoriser l’épanouissement collectif et aussi individuel, le premier ne pouvant pas aller sans le second.
L’épanouissement (et ses pendants : l’engagement et la fidélisation) commence et se termine par la constitution d’un collectif riche et divers et la prise en compte du meilleur de chacun ; c’est un regard positif du manager et de l’institution qui est requis, sur chaque collaborateur dans sa diversité et sa singularité.Permettre chacun de garder et affirmer pleinement sa personnalité est la meilleure façon de favoriser l’épanouissement et la performance.