On ne compte plus depuis quelques mois les livres, les articles, les reportages qui évoquent « la grande démission », ce phénomène de société mondial, lié notamment à la période COVID, qui entraîne un départ des entreprises de nombreux salariés. Si le phénomène doit être relativisé (cela ne représente finalement qu’une petite partie des salariés et le dynamisme du marché de l’emploi en est une des explications), ce mouvement est une bonne occasion pour les entreprises et les managers de s’interroger – dans un marché de l’emploi tendu – sur leur capacité à attirer et fidéliser les talents.
La quête de sens n’est pas un sujet nouveau ; c’est un des éléments clés à la disposition des managers et des dirigeants pour réussir à motiver leurs équipes ; « je m’engage mieux dans un projet que je comprends et qui me parle ». Ce que la période révèle en revanche, c’est un renouvellement des aspirations et attentes vis-à-vis du travail.
Le travail a longtemps été prioritairement un lieu de devoir ; il est de plus en plus, et majoritairement depuis quelques années, un lieu d’épanouissement. On peut facilement imaginer que la période que nous venons de traverser a accéléré ce basculement. Les périodes de confinement ont notamment été des occasions pour beaucoup de personnes de réfléchir à leurs aspirations quant à leur vie et spécifiquement à leur rapport au travail.
Si on juxtapose cela à un marché du travail tendu qui donne clairement la main aux salariés, on comprend bien que les nouvelles aspirations doivent être comprises et prises en compte par les entreprises si elles veulent être et rester attractives.
Dans ce contexte, les employeurs doivent donc réfléchir à leur attractivité, en ayant une vision plus large qu’uniquement le salaire, même si bien-sûr dans un marché en pénurie de main d‘œuvre l’attractivité financière est une clé d’entrée nécessaire et indépassable.
Cependant ce serait une erreur de penser qu’un bon salaire est suffisant ; car les aspirations nouvelles vont bien au-delà de l’aspect financier. Pour s’aligner dans cette période, les entreprises doivent s’adapter à chacun, écouter les aspirations aussi bien de leurs salariés que des candidats identifiés. Quelles sont les attentes de chacun au niveau de son épanouissement ? Des responsabilités ? De la possibilité de participer aux réflexions ? Des perspectives d’évolutions ? Du cadre et des conditions de travail ? Des modes de fonctionnement et notamment de prendre en compte les aspirations croissantes à un équilibre de vie qui passe par une part plus ou moins grande de télétravail ?
Le challenge est d’autant plus important pour les entreprises qu’il est de deux ordres : il s’agit premièrement de réussir à conjuguer des aspirations diverses de chaque collaborateur pour créer un ensemble qui fonctionne. Et deuxièmement de challenger des modes de fonctionnement établis, notamment de la part de dirigeants qui n’ont souvent pas les mêmes codes et les mêmes aspirations.
Mais c’est bien en challengeant l’existant et en développant leur adaptabilité que les entreprises réussiront à attirer et à garder les talents.
Dans cette équation à plusieurs inconnues, les managers ont un rôle central pour fidéliser. On dit d’ailleurs qu’on reste dans un poste pour ses collègues et qu’on le quitte à cause de son manager … même si cette affirmation est bousculée par un marché de l’emploi favorable aux salariés, elle reste un point d’attention à prendre en compte prioritairement.
L’attractivité sociale devient une clé de fidélisation, et elle passe en premier lieu par les managers.
Pour qu’un collaborateur puisse s’épanouir au travail en étant soi-même, il faut qu’il soit connu et reconnu par son manager en tant que professionnel et aussi plus globalement en tant que personne.
Pour qu’un collaborateur puisse exprimer ses idées, prendre des initiatives, se responsabiliser dans son travail, il est nécessaire que le manager le permette par le cadre de fonctionnement posé et par le degré d’autonomie qu’il laisse.
Pour que chacun puisse accéder à l’équilibre de vie qu’il souhaite, il faut un manager qui accepte de challenger son besoin de contrôle et organise le fonctionnement de son équipe avec l’agilité nécessaire.
Il est donc urgent pour les entreprises d’accompagner leurs managers dans tous ces aspects ; dans cette période particulière et complexe, il est essentiel de revaloriser le rôle du manager, et d’avoir des managers qui prennent et occupent pleinement leur place.
Chaque organisation devrait se poser la question suivante : « ai-je bien les bonnes personnes pour manager, et comment vais-je les former pour qu’ils deviennent ces leaders dont j’ai besoin ? ». La bonne nouvelle c’est qu’on ne peut pas se passer de managers, et que la période est le retour du management au sens le plus noble.