Melvin Conway, un informaticien, peut-être frustré par des réunions interminables, a formulé cette loi en 1968 : « Les systèmes conçus dans une organisation reflètent inévitablement les structures de communication de cette organisation ».
En clair, si vos développeurs parlent rarement avec vos chefs de produit, votre application aura autant de bugs qu’il y a de moustiques en été. Et si vos commerciaux et vos logisticiens ne s’entendent pas, vos clients auront droit à des livraisons aussi aléatoires que celles d’un service postal en pleine grève.
Regardez autour de vous. Vos outils, vos produits, et même vos processus quotidiens sont des miroirs de vos structures de communication. Voici quelques scénarios où la Loi de Conway s’invite régulièrement :
Un projet d’entreprise classique où chaque département veut imposer ses idées. Résultat : une page d’accueil aussi surchargée qu’un sapin de Noël, où le marketing a ajouté trop de « Call to action » la R&D des détails inutiles, et où personne n’a pensé à l’utilisateur final.
Votre vision stratégique était claire (enfin dans votre tête), mais après trois réunions interservices, elle ressemble à un jeu de déformation successive. À l’arrivée, l’exécution n’a plus rien à voir avec l’intention initiale.
La finance produit un tableau complexe, rempli de jargon incompréhensible, destiné à des équipes opérationnelles qui n’ont pas les clés pour l’utiliser. L’information reste enfermée dans une « boîte noire », créant des frustrations inutiles.
La Loi de Conway agit comme un miroir impitoyable : vos systèmes et résultats reflètent précisément vos structures internes. Les dysfonctionnements, loin d’être une fatalité, sont une opportunité précieuse. Ils offrent une grille de lecture pour repérer les points à transformer et amorcer le changement. Voici trois pistes pour poser un diagnostic :
Si vos projets avancent à la vitesse d’un escargot, c’est peut-être parce que vos départements travaillent en silo, sans synergie. Par exemple, dans une entreprise industrielle, chaque modification du produit peut nécessiter l’accord de quatre niveaux hiérarchiques différents. Résultat : un cycle de développement interminable.
Un CRM qui ne communique pas avec votre logiciel logistique ou un ERP mal configuré ? Ces outils sont souvent symptomatiques de divisions internes. Une entreprise de distribution a vu ses stocks exploser parce que les outils marketing et logistiques n’étaient pas synchronisés sur les prévisions de demande.
Si vos clients se plaignent d’une expérience incohérente – comme recevoir des factures mal expliquées ou des livraisons en retard – le problème ne réside pas uniquement dans vos systèmes. Ces symptômes reflètent vos défis internes.
Pour illustrer comment vos structures influencent vos résultats, reprenons l’image du buffet d’entreprise. Selon vos modes de communication, voici ce qui peut se passer :
Chaque service prépare sa table indépendamment. Les RH servent du bio, les commerciaux apportent des burgers, et la finance… rien (budget oblige). Résultat : un buffet schizophrénique qui laisse tout le monde perplexe.
Vous avez vaguement demandé à tout le monde de « collaborer ». Résultat : trois tables remplies de quiches, car personne n’a pris la peine de vérifier ce que faisaient les autres. Une redondance qui agace.
Une équipe centrale coordonne l’événement, répartit les rôles et valide les choix. Résultat : un buffet varié et cohérent, où tout le monde trouve son bonheur. Melvin Conway applaudirait.
Pas question de laisser la Loi de Conway transformer votre entreprise en désordre organisé. Voici des stratégies pour aligner communication et résultat :
Créez des équipes transversales dès le début des projets. Par exemple, une entreprise technologique qui réunissait marketing, R&D, et support client sur un projet logiciel a drastiquement réduit ses retours négatifs en impliquant chaque partie dès la conception.
Astuce décalée : Organisez des « speed-meetings » interservices où chaque département présente ses missions et besoins en trois minutes chrono. Cela brise les silos et ouvre le dialogue.
La communication interne est souvent pleine de jargon inutile. Encouragez une culture du langage clair pour éviter les malentendus.
Exemple concret : Une société de transport a créé un « dictionnaire interne » pour harmoniser les termes utilisés par les équipes. Résultat : moins de confusion sur les termes clés comme « charge utile » ou « flux tendu ».
Vos outils doivent refléter une organisation simple et connectée, pas vos conflits internes. Si vos logiciels ou processus sont trop complexes, vos équipes souffriront.
Challenge terrain : Demandez à chaque département d’expliquer son principal processus en utilisant des Lego ou des schémas simples. Si l’exercice est difficile, c’est un signe que vos structures doivent être revues.
Restons dans la métaphore. Votre entreprise est comme un buffet. Les silos sont des tables où chaque équipe dépose ses plats sans se soucier des autres. Si vous voulez un buffet harmonieux qui ravit tout le monde, il vous faut une vision claire du menu, une coordination active pour éviter les doublons, et un responsable qui veille à l’équilibre entre les saveurs.
Clés de réussite :
Un buffet organisé, comme une entreprise alignée, devient une expérience fluide et satisfaisante pour tous.
La Loi de Conway est un diagnostic puissant. Vos systèmes reflètent vos structures, pour le meilleur ou pour le pire. Mais ce n’est pas une fatalité. Avec des efforts pour améliorer la communication, vous pouvez transformer la cacophonie en harmonie et bâtir une organisation capable de relever ses défis.Et vous, que disent vos systèmes de votre organisation ?