Déléguer n’est pas clair dans l’esprit de tous : il y a beaucoup de confusion entre le fait de véritablement déléguer en laissant une autonomie et une responsabilité à la personne et simplement confier des tâches. Bien évidemment, quand on est manager on doit savoir faire les deux mais en toute conscience. Déléguer fait appel à plusieurs notions comme la confiance, l’autonomie, lâcher le contrôle. C’est finalement quelque chose qui s’apprend et qui est loin d’être inné chez beaucoup de managers.
Dans notre contexte actuel d’incertitude et de complexité, il est important de déléguer de façon optimisée. Le manager doit se positionner en manager ressources, il devient un coordinateur, un facilitateur, un révélateur de talents. Pour cela, le manager doit embrasser des compétences de communication, des soft skills et une approche de coach.
La délégation est un art difficile ! Il s’agit de tirer pleinement partie de la capacité d’initiative et des compétences de ses collaborateurs tout en restant garant des résultats de l’équipe. Certains managers vivent cela de façon cornélienne. Déléguer induit des postures managériales variées. Vous avez les managers qui n’y pensent pas, ceux qui disent que ce n’est pas possible, ceux qui ne veulent absolument pas déléguer, et enfin les adeptes de la délégation.
Il faut dire qu’il y a beaucoup de croyances associées au rôle du manager. Dans l’esprit de certains, le manager est presque un être humain supérieur 😊. Dans l’imaginaire collectif, on associe le manager au mot « plus » : il se doit d’avoir plus d’idées, plus d’engagement, doit fournir plus de travail, etc…
Par ce prisme, la délégation va, consciemment ou inconsciemment, perturber pas mal de managers qui vont alors considérer le fait de déléguer quasiment comme un abandon de poste, un échec, un constat qu’on ne parvient pas à faire seul… Entre aussi en jeu la personnalité ou les schémas mentaux qui influencent la façon de percevoir la délégation. Dis-moi qui tu es, je te dirai comment tu délègues !
Gary Hamel dans son livre « La fin du management » insiste sur la logique du moins. Il nous invite à considérer un management avec moins de directives, moins de coordination, moins de place prise, moins de vérifications. Le management se positionne davantage dans une posture d’écoute. Il s’agit finalement de se comporter en coach, de pratiquer la maïeutique et de lâcher prise.
La délégation évoque aussi un lien évident avec la dimension du contrôle évoqué par Will Schultz dans son modèle ICO. Pour rappel, Will Schultz dit que tout être humain a 3 besoins principaux qui contribuent à nourrir son estime de soi et qui aident à être plus performant :
Dans ces situations, le manager croit déléguer, mais en réalité, il intervient sans cesse, freinant l’autonomie de ses collaborateurs… et sans surprise contribue à les démotiver fortement !
D’un autre côté, quel manager n’a jamais eu de difficulté avec un collaborateur finalement incapable d’assumer les responsabilités confiées ? Ou pas suffisamment motivé pour y mettre l’énergie nécessaire ? Mais ces quelques cas isolés ne doivent pas empêcher les managers de déléguer… le management situationnel peut aider à poser un diagnostic et permettre de faire une délégation efficace. Il s’agit d’analyser le couple compétence et motivation pour déterminer ce qui est délégable.
L’objectif principal de la délégation pour un manager est de gagner en efficacité en se dégageant du temps pour l’allouer à des tâches plus « critiques », plus sensibles et à haute valeur ajoutée. C’est un facteur essentiel de performance individuelle mais aussi collective.
L’attention est finalement moins centrée sur l’action opérationnelle du manager et plus sur la responsabilisation de chacun des collaborateurs au service du collectif et des collaborations transversales. L’organisation a tout à gagner également. Cela permet d’accroître la performance collective et la résilience en développant des collaborateurs autonomes et plus engagés.
Cela favorise aussi la marque employeur et facilite les recrutements car l’entreprise aura une meilleure image de marque en externe.
La satisfaction effective immédiate d’une action de délégation est de gagner du temps pour se concentrer sur des tâches à valeurs ajoutée. Au-delà, quelle joie de se rendre compte que les collaborateurs peuvent épauler le manager, qu’ils développent de nouvelles compétences, qu’ils gagnent en confiance en eux ; bref qu’ils grandissent ! Réussir une délégation permet aussi aux collaborateurs de se rendre plus visibles et de voir leurs compétences mieux reconnues.
Pour démarrer dans l’art complexe de la délégation, nous invitons les managers à déléguer de préférence des sujets qu’ils maitrisent. Ils vont pouvoir ainsi suivre efficacement la prise en main du sujet par le collaborateur et cela va les rassurer pour jouer le rôle de garant du résultat. Il est préférable d’éviter de déléguer les sujets trop complexes ou polémiques car les managers auront alors besoin de suivre cela de si près que finalement la délégation ne sera qu’illusoire. Et cela risque de fortement démotiver le collaborateur et de passer l’envie au manager de déléguer de nouveau !
Il vaut mieux déléguer des processus ou projets complets plutôt que des petits morceaux. C’est plus formateur et motivant pour le collaborateur et ça simplifiera aussi la coordination en tant que manager.
Eviter de faire de la délégation poubelle : c’est-à-dire ne pas déléguer que les tâches ingrates dont le manager veut se « débarrasser » ; c’est très démotivant et cela se sait dans l’équipe.
En termes de posture, il s’agit d’être pédagogue, de laisser la place, d’être à l’écoute et surtout de savoir aussi déléguer la responsabilité. Pour résister à son ingérence, le manager a tout intérêt à se tenir à l’écart de certaines informations opérationnelles pour éviter de se mêler de tout. Il ne s’agit pas de déléguer puis de revenir tel un élastique dans un micro-management !
La délégation n’est pas seulement un transfert de tâches mais véritablement une démarche stratégique de responsabilisation des collaborateurs. La délégation permet au manager de se concentrer sur l’essentiel, sur des actions à forte valeur ajoutée comme la prospective, la stratégie. Elle est aussi un puissant levier de motivation.
Finalement la démarche du moins peut apporter beaucoup plus à tous !