Pour commencer cet article, il est important de s’entendre sur ce dont on parle. L’ego désigne le moi, c’est-à-dire la représentation et la conscience que tout individu a de lui-même.
Si on parle du sujet de l’égo du manager en entreprise, c’est traditionnellement pour en faire une qualité nécessaire à tout leadership. Dans le monde professionnel, il est important d’avoir de la personnalité. Or l’ego est rattaché en psychologie à la personnalité. L’affirmation de sa personnalité va permettre à tout individu, et spécifiquement aussi à un ou une manager, de s’affirmer, de mettre en avant et défendre son point de vue, de garder le cap face aux objections ou insatisfactions exprimées au regard de ses idées ou décisions. Quelqu’un dont la personnalité n’est pas « marquée » risque de ne pas être retenu pour un poste managérial car on craindra qu’il se fasse marcher sur les pieds par ses interlocuteurs et notamment par ses collaborateurs.
Le pendant de cela, c’est de choisir comme manager des personnes avec des fortes personnalités. On pourra alors tomber sur le côté négatif de l’ego, avec des managers qui s’affirment trop, s’imposent, défendent leur point de vue coûte que coûte et qui vont donc décourager, voire démotiver leurs collaborateurs.
L’ego associé au pouvoir – petit ou grand – peut aussi créer des réflexes inappropriés qui donnent une image négative du ou de la manager : contrôle de l’information et des idées, importance accordée aux attributs du pouvoir (titre, taille du bureau, type de voiture de fonction, place de parking, posture en réunion, participation à certains projets ou cercles…).
Dans le nouveau monde économique dans lequel nous naviguons tous, marqué par l’incertitude et la nécessité d’agilité et de réactivité pour répondre aux besoins de son marché (voir notre article sur le management dans un monde BANI), les talents individuels sont de plus en plus mis au service du collectif. Halte aux divas, vive le collaboratif. Une idée seule ne suffit plus pour trouver une réponse adaptée. Savoir qui a eu une idée n’a plus forcément de sens ; ce qui compte, c’est d’avoir trouvé ensemble l’idée adéquate. Les entreprises et équipes ont besoin de toutes les idées et de développer l’intelligence collective en mettant en place des processus de créativité opérationnelle adaptés à leur contexte.
Il est ainsi attendu des managers qu’ils sachent identifier et utiliser toutes les compétences de leurs collaborateurs et collaboratrices, et qu’ils mettent en place des fonctionnement collaboratifs qui, en plus de répondre aux motivations des équipes, vont permettre de trouver les réponses adaptées aux demandes du marché.
Dans ce nouveau paradigme managérial, et au delà de la notion d’égo du manager, ce n’est pas la qualité d’affirmation de soi qui va être la plus importante même si elle reste nécessaire. Ce qui va être déterminant c’est d’abord la capacité à intégrer et valoriser chacun, écouter et mettre en avant toutes les idées et mettre en place des fonctionnements qui permettent cela sans faire valoir son opinion plus que celle des autres, et en acceptant même de retenir une idée qui n’est pas la nôtre ou pas celle qu’on aurait retenu soi-même.
L’ego, s’il déborde, sera un écueil avec comme conséquence pour le manager d’imposer ses idées et de décourager ses collaborateurs à proposer les leurs.
Cette nouvelle posture n’est pas si évidente que cela à adopter ; le croire serait nier son histoire et sa culture personnelle, ainsi que celle de beaucoup d’organisations et entreprises. Et on ne change pas une culture du jour au lendemain.
Pour développer ce nouvel ADN managérial, il est indispensable d’accompagner les managers en les faisant travailler sur eux. Comme Gandhi le disait : « Be the change you want to see in the world ». C’est en proposant à ses managers un travail individuel de connaissance de soi et de prise de conscience de ses représentations personnelles qu’une entreprise pourra développer des nouvelles postures managériales, qui seront ainsi en phase avec ses enjeux de transformation des pratiques et fonctionnements.
En tant que manager, cela passe notamment par la prise de conscience individuelle de ses modèles et représentations associées au pouvoir et au leadership, de ses croyances limitantes, de ses freins, de son rapport au contrôle, et aussi de ses peurs.
Il ne s’agit pas de mettre son égo de côté, nous avons besoin de l’égo pour renforcer notre estime de soi, il s’agit de ne pas le laisser déborder ou nous envahir. Ce travail présente un double avantage : il va permettre à chaque manager de s’affirmer sereinement et à bon escient, et aussi de libérer toutes les énergies de son équipe.Ce type de travail est un beau chemin individuel et collectif qui sera d’autant plus efficace sur la culture commune qu’il impliquera tous les managers du dirigeant au manager de proximité.