L’intergénérationnel n’est pas un sujet récent. Depuis la nuit des temps, chaque génération a tendance à critiquer celles qui suivent. Trop ceci, pas assez cela ; la référence à des bonnes attitudes étant la leur bien sûr ! Pourtant, ce qu’on demande à un manager c’est de gérer ses collaborateurs de plusieurs générations, alors comment faire ?
La période récente a rendu encore plus d’actualité un sujet déjà présent en entreprise. Et avec le sujet du report de la retraite à 64 ans, les différentes générations vont se côtoyer encore davantage. La généralisation du travail hybride a pu aussi accroitre le fossé des pratiques de travail entre générations.
La guerre des talents et les difficultés à recruter poussent à mieux comprendre les spécificités – s’il y en a – de chaque génération pour les « séduire » et les fidéliser. En sachant que la pénurie de talents dans beaucoup de métiers va pousser à recruter et à garder toutes les générations. Or les motivations et les attentes ont beaucoup évolué depuis la pandémie, et cela quelles que soient les générations au travail.
Beaucoup de croyances sont alors à « détricoter » pour être plus efficients, ensemble, au service de la performance de son équipe.
Une génération n’est pas qu’une histoire de dates de naissance. Ce que la génération a eu comme « expérience historique » commune et marquante l’a forcément façonnée. Par exemple, les événements du 11 septembre, la COVID, le confinement ; tout cela influence le mode de fonctionnement de chaque génération concernée. Les membres d’une même génération ont ainsi une vision partagée du monde. Et tout cela crée aussi un empreinte sociétale commune à plusieurs générations.
Il faut donc se méfier des stéréotypes. Cependant, quelques repères sont nécessaires pour mieux comprendre ses collaborateurs et leurs aspirations :
Aujourd’hui, pour beaucoup de collaborateurs et collaboratrices, quel que soit leur âge, la flexibilité et les valeurs de l’entreprise comptent plus que le salaire. On parle beaucoup de qualité de vie au travail et d’équilibre entre sa vie personnelle et sa vie professionnelle. Le fait d’être confiné a remis au cœur des motivations l’importance de la famille, de la santé, des loisirs et fait prendre conscience à beaucoup que le travail n’était plus la valeur essentielle. On parle même de Quiet Quitting et de grande démission. Il s’agit de retrouver le sens au travail pour sentir que l’on contribue à quelque chose d’important. Devant ces nouveaux paradigmes, les pratiques managériales doivent s’adapter et de nouvelles compétences parfois inédites sont à développer.
En phase avec ces changements ou pas, ce n’est pas la question. On parle aujourd’hui de nécessité pour chacun d’adopter une nouvelle normalité.
Manager parfois 4 générations ensemble dans un service n’est pas toujours simple ! Les managers sont en première ligne dans leur quotidien. L’enjeu est crucial de réussir à intégrer opérationnellement et humainement à la fois les nouvelles générations et les séniors, de traiter chacun dans sa singularité sans tomber dans la caricature générationnelle car chacun est différent et derrière les caractéristiques associées à une génération ce qui est important c’est de connaître et comprendre chaque individu.
Comment actionner les complémentarités de chaque collaborateur pour obtenir plus de performance ? Et comment maintenir motivation et engagement en intelligence collective ?
Un exemple simple et concret des changements observés : le fameux temps de travail 9h00-17h00 est dépassé. Et toutes les générations en sont convaincues !
Même si les Boomers sont toujours très regardants quant à leur salaire, toutes les générations confondues sont sensibles aux avantages proposés aux collaborateurs et collaboratrices.
La flexibilité, la possibilité de faire du télétravail sont des choses importantes pour les générations Z et aussi pour les Milléniaux. Les Boomers y sont moins sensibles « a priori ». Accorder du télétravail n’est plus suffisant. Au-delà de cela qui est devenu un « acquis », quand c’est possible bien sûr selon le métier exercé, c’est vraiment une demande de souplesse dans l’organisation de son temps de travail qui est demandé.
Connaissez-vous d’ailleurs notre livre blanc sur le management vu par les jeunes ?
Cela remet le management par objectif au cœur des pratiques. On est loin du contrôle des horaires de présence ! On est plus dans la logique de l’autonomie et de l’auto-contrôle.
Autre point très important, ce sont les valeurs incarnées par l’organisation. Par exemple, quel est le positionnement de son entreprise en matière de changement climatique, d’équité femme-homme, de diversité, et cætera ? Et là encore, ce ne sont pas que les jeunes générations qui y sont sensibles. On ne peut donc plus ignorer ces sujets dans le management de ses collaborateurs et cela, quel que soit leur âge.
Pour les managers, il s’agit d’être vigilant sur soi-même et sur son propre fonctionnement. En effet, selon la génération dont le manager est issu, il a tendance à avoir des comportements différents. Bref, il a des biais cognitifs et ne s’en rend pas toujours compte. Avoir des croyances n’est pas un problème, croire que l’on n’en a pas en est un majeur.
Les changements sociétaux sont en partis portés par les nouvelles générations. En tant que manager, il est intéressant d’analyser notre propre résistance à ces changements et de comprendre comment cette résistance impacte notre management.
En regardant des études faites sur les différentes générations, j’ai moi-même été surprise. Par exemple, les plus anciens sont assez peu sensibles finalement au look des collaborateurs. C’est la génération Z qui est la plus réticente à accepter les tenues informelles.
De la même façon, les seniors sont plus enclins à prendre des risques avec les collaborateurs en acceptant de les former s’ils n’ont pas toutes les compétences requises. Donc, au-delà de la prise de conscience, il faut corriger ses comportements.
Nous entendons parfois : « Il faut déconstruire tous les stéréotypes que l’on peut avoir ! »
En fait, le problème ce ne sont pas les stéréotypes, ce sont les comportements discriminatoires qui en découlent. Donc pour gérer au mieux l’intergénérationnel, il s’agit d’être conscient de ses stéréotypes et vigilant sur ses comportements.
En fait, les meilleures pratiques managériales consistent à écouter chaque collaborateur, collaboratrice pour découvrir de façon fine et approfondie quels sont ses motivations, ses besoins, ses préférences d’organisation du travail, les avantages dont il souhaite bénéficier, et de faire en sorte de s’adapter à chacun. On ne parle pas de sur adaptation, de « câlinothérapie » mais de prise en compte de chacun dans la mesure où cela permet d’avancer vers le but commun. C’est en faisant cela que l’on pourra faire travailler intelligemment ensemble des jeunes de 25 ans et des personnes expérimentées de plus de 60 ans. Gérer l’intergénérationnel c’est s’appuyer sur les talents et les compétences de chacun et que l’on générera ainsi de la complémentarité intelligente.