Le monde du travail a été profondément impacté par la crise sanitaire. Ce constat n’est pas seulement français ou européen mais mondial. Un numéro entier de « courrier international » a d’ailleurs été consacré au sujet (« Remettre le travail à sa place » N° 1620 du 18 novembre 2021), avec des articles issus de tous les continents. Les constats partagés induisent une évolution indispensable des cultures, postures et pratiques managériales pour s’adapter à ce nouveau contexte et réussir à engager et fidéliser les équipes.
La crise sanitaire a eu un impact très fort sur l’organisation du travail bien-sûr avec l’avènement du télétravail ; mais aussi plus fondamentalement sur le rapport au travail de chacun, avec une montée très forte d’une aspiration à l’épanouissement global et pas seulement par le travail. Ce qui passe par des besoins individuels très variés d’équilibre de vie et d’organisation personnelle.
Ces choix individuels ont déjà un impact très fort sur certaines professions (restauration, transport routier) qui ne trouvent plus de main d’œuvre et qui sont contraintes d’augmenter fortement les rémunérations pour attirer des collaborateurs. Le pouvoir dans de nombreux secteurs a changé de main ; ce ne sont plus les entreprises mais les salariés qui fixent les règles du jeu.
C’est le cas aussi des secteurs déjà en pénurie de main d’œuvre avant la crise, comme beaucoup de métiers techniques. Dans ce contexte de guerre des talents, ce sont les salariés qui ont la main non seulement au niveau de la rémunération, mais aussi de l’organisation du travail. Plusieurs de nos clients nous partagent des demandes de leurs collaborateurs – par ailleurs engagés dans leur travail – d’aménagements des horaires et des rythmes de travail, de prises en compte dans les organisations de choix de lieu de vie en dehors des grandes métropoles, d’aspirations très diverses quant au télétravail …
Dans le même ordre d’idées, plusieurs pays – paradoxalement pas parmi les plus innovants ou protecteurs pour les salariés – ont lancé des expérimentations sur la semaine de 4 jours.
Toutes ces aspirations et évolutions viennent bousculer les habitudes et les croyances traditionnelles sur le fonctionnement des entreprises et sur les rapports de force au travail.
Revenons 2 ans en arrière. Pour un nombre important d’entreprises, le télétravail ça ne pouvait pas marcher ou alors pas chez elles. Contraintes et forcées ; elles s’y sont mises. La grande surprise dans beaucoup de secteurs d’activité c’est que ça marche, que les entreprises n’ont pas perdu en performance, que parfois cela a même été le contraire. De plus, beaucoup de collaborateurs plébiscitent ce nouveau mode de travail. Le travail hybride s’installe durablement.
Autre paradigme qui s’écroule : c’est l’entreprise via ses managers qui a la main pour fixer la cadre et les règles de travail. Et la première mission d’un manager est de partager et de faire respecter le cadre. Notre intention n’est pas ici de dire qu’il n’y a plus de besoin de cadre en entreprise. Le cadre demeure indispensable à un fonctionnement collectif tourné vers l’atteinte d’objectifs communs. Ce qui est modifié, c’est la façon de fixer le cadre, qui doit prendre en compte aujourd’hui de façon pragmatique les aspirations, besoins et contraintes des collaborateurs. Ce qui change, c’est aussi l’équilibre entre le cadre et les zones d’autonomies des équipes, avec un mouvement qui va vers un cadre précis et l’augmentation des zones d’autonomies, fortes et réelles. Par exemple, dans la nouvelle donne le manager va partager l’objectif avec un collaborateur, et va laisser celui-ci s’organiser pour réaliser sa mission.
Pour attirer, pour engager et pour fidéliser les collaborateurs, il est de plus en plus nécessaire de s’adapter à leurs besoins :
Pour réussir cela ; les cultures managériales doivent évoluer, aller vers moins de contrôle et plus de confiance.On en parlait déjà depuis longtemps. Cela devient une nécessité sous peine de se priver des talents nécessaires pour réaliser sa mission.
Le rôle du manager est challengé entre les trois dimensions du pilote, du coach et du leader. Si ces 3 postures existaient déjà et restent d’actualité, les façons de les incarner évoluent.
– Le nouveau pilote partage le cadre nécessaire, il manage par les objectifs pour mettre en mouvement l’équipe, mais challenge son rapport au contrôle pour libérer les énergies. Il fait évoluer le cadre avec son équipe, et donne des zones de liberté sur tout ce qui les concerne directement (et notamment le fonctionnement quotidien).
– Le nouveau leader donne du sens aux décisions et libère les énergies pour que les collaborateurs osent, proposent des choses et sachent prendre des décisions en autonomie puisqu’ils ont en tête en permanence le projet auquel ils contribuent.
– Le nouveau coach est celui qui forme, accompagne et fait grandir son collaborateur. Cela correspond à une demande forte des jeunes talents mais pas seulement. Il sait faire des feedforwards constructifs, positifs et orientés vers le futur pour éviter le côté culpabilisant et « maitre d’école » du feedback classique. Le manager coach est ouvert aussi aux idées, suggestions du collaborateur et sait écouter chacun, quel que soit son ancienneté dans le service. Toutes les singularités, diversités des collaborateurs sont des richesses pour faire progresser le collectif.
Ces nouvelles postures sont des leviers essentiels de motivation et d’engagement des collaborateurs. A vous de jouer !